Serge Savard, le grand Sénateur, l’homme confiant, n’avait qu’une peur dans la vie. Se faire huer quand il jouait pour le CH ou qu’il était le directeur général de l’équipe.
Un des moments de rédemption dans sa longue et belle carrière est survenu lors de la fermeture du Forum. Quand les capitaines se sont transmis la torche que « des bras glorieux avaient portée bien haut » et que ce fut son tour, les applaudissements et les cris ont comme lavé des années de huées lancées par quelques malappris et jaloux. Le visage de Savard était rayonnant.

Photo: Université de Sherbrooke – Serge Savard
Patrice Brisebois a vécu l’enfer tant au Forum qu’au Centre Bell. Tellement que Bob Gainey, furieux, avait parlé de ces bâtards qui s’excitaient à huer Brisebois. Ça ne prend que quelques dizaines de ces épais môrons pour transformer un match en une épreuve pénible pour un athlète.
Ces môrons se sont moqués une fois de Patrick Roy et l’ont tourné en dérision lors d’une défaite contre les Red Wings de Detroit. Parfait. Roy leur a dit un spectaculaire au revoir et est allé gagner deux Coupe Stanley avec Colorado et a contribué à plonger le CH dans trente ans de misère.
Les môrons ne méritaient pas mieux.

Photo: NHL.com – Patrick Roy
ANTHONY MARTINEAU A RAISON
Samuel Montembeault a été hué en première période contre les Flyers de Philadelphie. Il a donné trois buts alors qu’il a été pratiquement le seul des Glorieux à toucher au puck. Le Canadien a lancé deux, 2, DEUX, fois contre les Flyers. Le monde aurait espéré quoi ? Que la Flanelle sorte de la patinoire à 2-0 !
Anthony Martineau, qui n’est pas le moins voyant des commentateurs de TVA Sports, a des défauts. Mais il a aussi une maudite grande et grosse qualité. Il ne travaille pas pour faire plaisir au Canadien. Il est payé par TVA et il travaille pour TVA Sports. Et en travaillant pour sa télé, il se trouve à travailler pour le monde qui regarde sa télé. Ses clients, ce n’est pas Chantale Machabée, c’est Ti-Toine et Jasmine qui regardent leur émission.
Martineau s’est emporté avec raison contre les fefans qui se croient tout permis parce qu’ils payent un ticket.
Son patron l’a remis à sa place dans une chronique mais c’est Martineau qui a raison. Acheter un ticket ne donne pas le droit d’être un salaud et de s’acharner sur un ou une athlète qui connaît un passage à vide.

Photo: IG – Anthony Martineau
Tant qu’à ça, à la prochaine pièce de théâtre que vous allez voir, si vous n’êtes pas satisfait de la réplique d’une comédienne, levez-vous et huez la bien fort. Chou la pourritte !
Et si le violoncelliste échappe une mauvaise note pendant une symphonie de Beethoven lors d’un concert dirigé par Yannick Nézet-Séguin, envoyez-fort la gang de St-Jérôme. On le hue comme un salaud. Ça va faire du bien. L’épais, il ne ratera pas son si bémol au prochain concert.
Et c’est sans parler de vos chouchous humoristes. Martin Matte, Mike Ward, tous les autres, allez-vous les huer en chœur s’ils ratent un gag ? Deboutte la gang, on hue !
Même dans un combat de boxe, allez-vous huer le boxeur local qui se fait envoyer au tapis pendant un combat ? Ben oui, Madame Chose, c’aurait été génial de huer Thomas Chabot pendant qu’il était à genoux au cinquième round de son dernier combat et qu’il puisait au fond de lui la force et le courage de se lever pour continuer…
Chou Chabot…

Photo: Jeff Lockhart – Thomas Chabot vs Logan Clouthier
Et vous pensez quoi de Samuel Montembeault ? Que c’est facile d’accorder des buts alors qu’on dirait que la rondelle a des yeux. Et que toute décision qu’il prend semble se tourner contre lui ? Chou Montembeault !
Désolé, acheter un ticket ne donne pas le droit d’être un épais et un salaud.
En fait, on peut accepter que deux équipes ou deux athlètes qui donnent un spectacle désolant et de mauvaise qualité soient hués. Collectivement. Ça arrive dans la boxe et au hockey. Mais ce n’est pas un acharnement contre un individu, contre une personne. Ce n’est pas du défoulement cruel et pervers.
Soit dit en passant, pourquoi est-ce que Gary Bettman se fait huer à toutes les fois qu’il se présente quelque part ? Parce qu’il a une face à claques ? Parce qu’il est d’une religion que vous n’aimez pas ? Parce qu’il est de petite taille ? À cause des Nordiques ? Ils s’en foutent au New Jersey. Pourquoi ? Parce que c’est amusant et que ça fait du bien de huer et d’humilier une personne ?

Photo: Hockey30 – Samuel Montembeault
Dans le fond, c’est celui qui hue qui devrait trouver la réponse. Ça l’aiderait tellement avant d’aller se coucher.
Il dormirait mieux.
DANS LE CALEPIN
Les gens vont adorer le nouveau documentaire du réalisateur François Coulombe-Giguère qui sera présenté ces prochains jours sur Punching Grace et à TVA Sports. Jhon Orobio est arrivé jeune gamin de 18 ans à Montréal. Il ne savait pas comment ouvrir un compte de banque. Il ne parlait qu’espagnol.
On le redécouvre aujourd’hui, encore tout jeune mais vrai homme, amoureux et papa, s’exprimant en riant dans un français adorable dans les entrevues et traitant son ami et grand frère Moreno Fendero de « poule mouillée » et revenant sur les rues et les quartiers de son enfance en Colombie… où il ne fait pas bon passer pour un millionnaire. J’ai trouvé cela très bon. Très, très bon en fait…

Photo: Vincent Ethier – John Orobio