La victoire de Félix Auger-Aliassime hier à New York était belle et impériale. Une domination en puissance et en régularité.
La victoire de Venus Williams et de Leylah Fernandez était joyeuse et touchante. Ces deux jeunes femmes sont en train de voler le show à New York. En double, faut le faire.
D’abord Félix. Il affrontait une bête noire. Andrey Rublev qui joue à l’émotion, aux grandes démonstrations de colère et de découragement, avait battu Félix sept ou huit fois dans leurs derniers affrontements.
Mais ça, c’était l’autre Félix. Le Félix du creux de vague. Le Félix blessé, dont la confiance avait été durement amochée par une lourde série de défaites.
Pis, vous le savez, Marc Messier vous l’a dit. C’est encore plus vrai au tennis, ça prend « la dureté du mental ». Et cette dureté, le Québécois semblait l’avoir perdue. Des mauvaises défaites, des blessures, des changements de coachs, changement de gérant d’affaires, tout pesait sur les performances de l’ancien no 6.

Photo: Sportskeeda – Andrey Rublev et Félix Auger-Aliassime
Hier, après avoir pulvérisé le grand Alexander Zverev, les deux derniers sets à 6-4, mettons que c’est une pulvérisation poétique, Félix a dominé Rublev d’un bout à l’autre du match des seize.
Dans le plus grand stade de tennis au monde, le Arthur Ashe, bondé de spectateurs profitant d’un congé férié. Et le Arthur Ashe, un jour de fête, c’est bruyant et chaleureux. Rien à voir avec les quatre fraises dans la crème à 16 $ de Wimbledon. T’échappes une fraise et ça te prend une hypothèque.
Félix a retrouvé les deux armes qui l’avaient emmené au sixième rang mondial. Une première balle de service rapide et lourde. Et un coup droit en puissance même sur son décroisé, dévastateur et capable de gagner plusieurs points cruciaux.
Évidemment, quand il se retrouve complètement à gauche du terrain pour frapper avec son coup droit au lieu du revers, Félix a besoin d’une très grande vitesse pour couvrir tout le terrain sur la frappe de son adversaire. Un Félix en santé le fait. Un Félix tout croche se fait balayer. Hier, il était en santé, même si son dernier point a été obtenu par un parallèle du revers que les dieux du tennis ont savouré.

Photo: The Star – Félix Auger-Aliassime (2023)
Mais, Le Félix des deux ou trois dernières années torpillait ses matchs avec des doubles-fautes à répétition au pire moment. J’ai souvent écrit que son lancer de balle était trop bas mais ses nouveaux coachs ont corrigé le problème puisque le Québécois a évité ces erreurs catastrophiques sur une surface dure comme celle de Flushing Meadows. Même que la plupart de ses deuxièmes services lui permettaient de prendre quand même l’offensive.
En entrevue après son match, Auger-Aliassime a été courtois et brillant. Mais il a passé son message. Il est enfin en santé et il a retrouvé sa concentration et sa confiance.
En fait, dirait le Boy, il a retrouvé « sa dureté du mental ».
Bravo, on va tripper fort d’ici la fin du tournoi. Il a un essayage pour son complet de noces lundi. D’ici là, seul le tennis est à son agenda.
Il peut même se permettre d’atteindre la finale.
On va suivre ça.
Leylah Fernandez a le don de se faire aimer au US Open. On se rappelle de sa finale à New York quand elle n’était qu’une gamine.

Photo: Canadian Olympic Committee – Leylah Fernandez
Maintenant qu’elle est une jeune femme, elle fait équipe avec une femme mature et sympathique et contre toute attente, se met à gagner des matchs en double.
Venus Williams a 45 ans. Ses plus grands jours de sportive sont derrière elle. On est loin de la grande ado efflanquée vêtue d’un ensemble de course argenté qu’on avait rencontrée lors de son premier Wimbledon en 1997.
Personne ne croyait que ces deux femmes qui s’entendent comme deux vieilles amies, en fait une jeune et une plus âgée, auraient un plaisir fou à jouer ensemble, surtout qu’elles entraînent dans leur plaisir, la foule de Flushing Meadows.

Photo: WTA – Venus Williams
Avez-vous vu hier la joie des fans partagée par les deux joueuses sur le terrain ? Même Hélène Pelletier n’arrivait pas à nous dire ce qu’elles avaient « dans leur tête ». Et Yvan Ponton, ce cher vieux sensible, avait le moton. On le sentait très bien.
D’habitude, sauf quand Sébastien Lareau y brillait, les gens se foutent pas mal du double. Mais des fois, il s’y raconte de très belles histoires.
Et après tout, le sport, une fois que t’as enlevé le cash, c’est des histoires.