Photo : Denis Germain – Dans un duel Québec-Ontario entre les deux meilleurs de leur province respective, Steven Butler et Steve Rolls vise l’international, le 7 mars prochain, au Casino de Montréal.
Steven Butler est loin des siens pour un second camp d’entraînement consécutif. C’est plus froid et moins huppé que Vegas ou L.A., mais c’est au nord des États-Unis que le Montréalais espère atteindre le niveau supérieur.
Face à Murata et Janibek, Butler a passé à une victoire, peut-être même un coup de poing, d’atteindre le sommet. Il aurait donc regretté toute sa vie de ne pas avoir tenté une troisième mise en utilisant sa carte ultime : la meilleure version de lui-même.
Pour ce faire, à des centaines de kilomètres de la maison ; plus aucune distraction. Sa vie n’est que boxe.
« Je n’avais pas envie d’être un jour le genre de ‘mononcle’ qui te sort le : ‘moi j’aurais pu faire ça… si j’avais fait ci…’ Je n’ai aucun regret et je donne tout parce que je ne veux jamais en avoir », raconte la fierté du Club Champion, supporté de loin par Rénald Boisvert et guidé de près par John Scully.
À seulement 28 ans, ‘Bang Bang’ Butler boxe pro’ depuis déjà une décennie. Son compteur frôle les 40 duels, dont 2 de titre mondial. C’est déjà beaucoup, mais ce n’est pas assez, alors pas question de ralentir.
« Dans une carrière de boxe, tu dois garder la pédale au fond parce que tu ne sais jamais quand l’auto va s’arrêter », reflète le jeune vétéran.
De toutes ses forces
Pour ce qui est d’améliorer la voiture Butler, Scully mise sur ce qu’elle fait de mieux.
« C’est un gars d’expérience, un gars qui connaît sa boxe. On le voit, il travaille avec Marc Ramsay dans le coin d’Artur Beterbiev. Mais moi, ce qui m’a fait accrocher, c’est qu’il me dise : ‘Steven, t’as assez de points forts pour devenir champion du monde. Oui, on va travailler tes défauts, mais moins que tes forces, parce que c’est elle qui feront ton plan de match’.je ne veux pas que tes faiblesses deviennent ton plan de match’ ».
Ç’a dû être le speech du siècle.
Au lieu de prolonger ses vacances à Disney World, en août dernier, il demanda à sa femme de le déposer à l’hôtel situé non loin du gym de boxe au look de vieux hangar où le coach surnommé ‘Iceman’ travaille. À l’image du lieu où il passa finalement plus de deux mois, la performance en résultant ne fut pas sa plus fancy, mais elle fit le travail alors qu’il reprit le chemin de la victoire face à Ivan Alvarez, en novembre dernier.
Difficile de juger cette performance. L’homme revenait d’une défaite, mais aussi du doute, deuil et dépression l’ayant suivi. Il revenait de « la noirceur à la lumière », pour citer Tremblay. Ce soir-là, il a vaincu Alvarez, mais surtout ses démons.
Juste pour ça, niveau magie, le gym de Scully n’a rien à envier au château de Disney.
Niveau boxe, le combat face à Rolls en dira plus long.
« On est à la guerre »
Mais qui dit combat face à Rolls, dit retour aux États-Unis. Et puis, même en louant un condo plutôt une chambre d’hôtel, Butler est aussi loin du rêve américain que de ses proches.
« Loin des yeux, près du cœur », garde-t-il en tête.
C’est qu’au cœur d’une Saint-Valentin peu romantique, loin de sa femme et de ses enfants, il met les gants chaque semaine avec des espoirs américains avides faire leurs preuves en tentant de lui « taper sur la gueule ».
« C’est comme des combats. Les gars ne se respectent pas, ils sont là pour se taper sur le menton, pour ne pas dire sur la gueule », indique-t-il avec un sourire en coin.
« Mais vraiment, ça aide à rester stimulé. Sans rien enlever au Canada, le fait est qu’on se connaît tous : Erik Bazinyan, Christian Mbilli, on souhaite le meilleur pour tout un chacun. Tandis qu’ici, on est à la guerre et c’est chacun pour soi. »
Des portes closes à votre écran
En parlant de séance d’entraînement toute canadienne. Butler et Rolls ont déjà mis les gants ensemble à quelques reprises. Restant évasif, le Québécois en a tout de même commenté ceci.
« Plusieurs auraient payé pour voir ça… Ce n’est pas pour rien qu’on en a conclu un combat », affirme-t-il, très conscient de l’enjeu qui les remet sur le même chemin.
« On a été à l’international et on a échoué. Là, c’est de savoir qui veut le plus y retourner et qui restera un boxeur local », enchaîne le fils du quartier Saint-Michel, comptant aller jusqu’au bout d’un rêve dépassant largement son prochain adversaire.
Entre rêve et réalité, Steve Rolls demeure un obstacle de taille. Plusieurs doutent même que le séjour de Steven Butler au pays de l’Oncle Sam lui suffise pour aller au bout de ses ambitions. Le principal intéressé, lui, ne leur accorde pas d’importance, préférant doubler sa reconnaissance envers ceux qui ont foi en lui. Mot à ceux-ci :
« Le meilleur est à venir. Je sais que vous y croyez, j’y crois et on va y arriver. »