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Le pouvoir de Mike Tyson

Corey Erdman - DAZN

Photo: Netflix/MVP – Le week-end dernier, la culture populaire a puisé dans sa ressource renouvelable la plus fiable: un retour de Mike Tyson.

Pendant près de trente ans, «le retour de Tyson» a été vendu avec succès au public. Qu’il s’agisse du retour de sa défaite contre Buster Douglas, d’un retour de prison ou d’une série d’autres retours ayant suivis divers revers ou obstacles. C’est comme si c’était inépuisable… Même lorsque Tyson, dans l’une de ses périodes les plus sombres, est revenu pour affronter Corey Sanders – avec un casque et sur la télévision payante – les gens ont continué à regarder.

Mais c’est l’histoire de son retour en dehors du ring qui a fait de son dernier retour le plus réussi de tous les temps.

Selon presque tous les critères, ce fut aussi l’un des événements de boxe les plus réussis de tous les temps, puisqu’il a affronté Jake Paul au Cowboys Stadium de Dallas, au Texas, en direct sur Netflix.

Les fautes et les transgressions de Mike Tyson ont été bien documentés. Certaines d’entre elles lui ont même valu du temps derrière les barreaux. Par la suite, ses histoires sombres – aussi – ont été bien documentés; de ses débuts horribles à Brownsville, au pillage de sa richesse par des parasites, en passant par des tragédies familiales plus récentes. Malgré tout, Tyson a réussi à passer de la réputation d’homme le plus méchant de la planète à celle de l’oncle fumeur de joints bien-aimé qui peut apparaître dans tout; des dessins animés pour enfants aux publicités pour voitures.

Iron Mike est l’homme sur lequel tout le monde semble s’accorder. Tyson peut être l’avatar de tout ce que vous voulez qu’il soit, quel que soit le système de croyances auquel vous adhérez. Faites défiler votre ‘timeline’ et un clip ou une citation de Tyson s’accompagne avec tout, des ‘memes’ promouvant les idéaux masculins, le véganisme, la religion, ou encore soulèvement politique…

Il est facile de dire que le succès de cet événement est simplement dû au fait qu’un grand nombre de personnes sont stupides, et il y a certainement du vrai là-dedans.

Il n’était pas nécessaire d’être un expert en boxe pour comprendre qu’un homme de 58 ans, qui venait de se remettre d’une terrible crise d’ulcère et qui ne marchait parfois avec une canne depuis quelques mois, n’allait probablement pas battre un homme de 27 ans au sommet de sa forme. En effet, certains se sont mis à réfléchir à la qualité raisonnable du ‘vieux’ Tyson.

Pour d’autres, Mike sera toujours le meilleur Mike, quel que soit son âge. C’est pourquoi, pendant des années avant ce combat, ou même son exhibition contre Roy Jones, les mêmes clips de Tyson frappant les mitaines dans la salle de sport sont devenus viraux, avec des légendes variées allant jusqu’à «IRON MIKE EST TOUJOURS UN MONSTRE!» et une section de commentaires discutant des combattants actuels qu’il détruirait – pas à l’époque, mais aujourd’hui.

En fin de compte, Tyson en 2024 représente notre imagination, notre désir de trouver l’espoir au-delà des limites de la raison. En partie, c’est la mythologie qui perdure autour de Tyson, mais au-delà de cela, c’est le désir de tout le monde de croire qu’un retour est toujours possible, quoi qu’il arrive. Tyson a été, ou aurait dû être «fini» de mille façons différentes – prison, drogue, alcool, mauvaise santé, âge – et pourtant il est toujours là, avec une image complètement réhabilitée, et même de retour sur le ring.

Alors que Tyson se dirigeait vers le ring vendredi soir, une bonne partie des 60 millions de personnes et plus de 70 000 personnes à l’intérieur du stade lui-même ont ressenti la même sensation dans leur corps. L’anticipation que seul un spectacle de boxe peut procurer, le cocktail de peur et d’espoir que seul un Mike Tyson en solo, chargé d’une serviette noire, marchant vers le ring au son d’une mélodie new-yorkaise ne faisant qu’accentuer le personnage d’Iron Mike.

Les signes étaient pourtant là, bien que des millions de gens rêvait du contraire, qu’il n’allait pas infliger le châtiment miraculeux à l’influenceur devenu boxeur. Dès sa marche, un petit pas hésitant l’a presque fait basculer, attirant l’attention sur l’attelle sur son genou. Le regard glacial, autrefois fixé uniquement sur son adversaire alors qu’il descendait l’allée, était maintenant fixé sur le sol devant lui – peut-être en train de regarder sa démarche, peut-être enfermé dans un cycle de doute envers lui-même…

Mais même lorsque les signes de vieillissement, et avec eux la réalité qu’un K.-O. pour Tyson n’allait pas arriver, sont devenus abondamment clairs après le premier round, la leçon que beaucoup de gens voulaient tirer de ce qu’ils regardaient n’était pas qu’ils étaient des marques qui avaient été dupées, mais qu’il y avait une plus grande victoire pour laquelle Tyson se battait.

«C’est ce que les gens respectent», a dit Tyson un jour. «Le fait que je ne sois pas un imbécile qui s’est couché sur le dos et a abandonné.»

La réalité est que Tyson a déjà abandonné. La dernière fois qu’on l’avait vu dans un combat professionnel homologué, contre Kevin McBride. Dans son interview d’après-combat ce soir-là, il a exprimé sa honte d’avoir embarrassé le sport et s’est excusé auprès des fans. Ce soir-là, il savait probablement à un certain moment que ses chances de battre Paul étaient minces, mais il a néanmoins tenu le coup.

Dans ce sens, c’était Rocky dans la vraie vie. Il est l’histoire du retour américain auquel tout le monde veut croire, et jusqu’à ce qu’il soit littéralement dans le sol, il sera l’étoile polaire de tout rêve farfelu auquel les gens veulent croire.

Le retour de Tyson en tant que figure appréciée de la culture pop peut, il faut certainement l’étudier à un niveau plus profond. Pour certains, il s’agit peut-être de l’admiration pour la vulnérabilité volontaire de Tyson au micro de son podcast et dans diverses interviews. Pour d’autres, il s’agit peut-être d’une sorte de règlement de comptes, d’excuses pour le monstre que Tyson a représenté pendant si longtemps, pour pour plusieurs.

À un niveau plus simple, un combat de Mike Tyson est quelque chose dont presque tout le monde a une histoire – et c’est encore plus vrai cette semaine que la semaine dernière. Tout le monde a une histoire de rassemblement pour un combat de Tyson, dans le sous-sol de votre famille, au bar, chez le barbier, où que ce soit. Les combats de Tyson sont des moments marquants dans la vie des gens depuis les années 1980, des moments et des rassemblements que l’on peut replacer dans le temps en un éclair.

Dans un monde du divertissement de plus en plus fragmenté, très peu de gens ont le pouvoir de créer une monoculture, et Tyson en fait partie. Tout le mérite revient à Paul pour avoir été le cerveau de cet événement, mais ne vous y trompez pas, 60 millions de personnes n’auraient pas regardé Paul combattre quelqu’un d’autre.

Mike Tyson n’a peut-être plus le pouvoir de mettre K.-O. Jake Paul, mais il avait toujours le pouvoir de faire s’arrêter le temps, de faire en sorte que tous les horizons se concentrent sur la même chose, rêvant du même rêve pendant quelques heures. Pour des millions de personnes, Tyson n’a jamais perdu, car il n’a jamais accepté la défaite comme un échec. Même une tache rouge sur son BoxRec avec le nom de Jake Paul à côté n’a rien changé à cela.

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