Depuis l’annonce de son combat contre Anthony Joshua, une nouvelle vague de détracteurs affirme que tout serait déjà joué d’avance, que l’affrontement serait « scripté » comme un numéro de lutte, et que les combats de Jake Paul ne seraient rien d’autre que des mises en scène lucratives.
Ce texte existe précisément pour répondre à ces accusations, non pas pour protéger une vedette, mais pour ramener un peu de réalité, de technique et d’expérience dans un débat trop souvent dominé par les impressions et les fantasmes.
Dans la boxe moderne, peu de figures divisent autant que Jake Paul. Sa montée éclair, son influence gigantesque et sa capacité à transformer chaque combat en phénomène culturel alimentent forcément les soupçons. Que certains pensent que ses combats soient arrangés, je le comprends : l’histoire du sport a déjà été tachée, et l’argent attire toujours les théories.
Mais après des années dans les coins, à gérer les coups, les coupures, les visages qui se déforment sous l’impact, je le dis clairement : je n’y crois pas. On peut m’accuser de naïveté, mais ma position repose sur la mécanique réelle d’un combat, pas sur le fantasme.

Photo: Sportsnet – Jake Paul
Truquer un combat aujourd’hui est presque impossible. Il faudrait la complicité de trop de gens : un adversaire, son coin, un arbitre, une commission, parfois même des officiels liés aux paris. Le moindre geste suspect devient viral en quelques minutes. Et surtout, un boxeur qui simule trahit son corps. Les vidéos peuvent mentir ; la biomécanique, non.
Quand j’analyse certaines chutes dans les combats de Paul, je ne vois ni comédie ni chorégraphie. Je vois des réactions neuromotrices authentiques.
Quand un coup atteint le tronc cérébral, même légèrement, le corps répond par une micro-perte de contrôle tonique : les jambes se figent, puis se dérobent. Ce n’est pas une “décision”, c’est un court-circuit.
Une simulation, elle, manque toujours de cohérence :
soit l’athlète s’effondre trop “proprement”,
soit il oublie la désorientation visuelle,
soit la séquence n’a pas de lien avec le timing réel du coup.
Un vrai knockdown, ça se lit. Les pupilles qui vacillent, le délai de réaction, la posture qui se ferme malgré lui. Ces détails, je les vois à 30 centimètres, sous l’éclairage cru du ring. Ils ne se trichent pas.

Photo: Ministry of Sport – Jake Paul vs Mike Tyson
On cite souvent Mike Tyson comme argument. Comme si son nom devait annuler trente ans d’usure. Mais un système nerveux, ça vieillit.
La vitesse de conduction diminue, la proprioception se détériore, la tolérance au choc n’est plus la même. Chez un ancien champion, les microtraumas accumulés rendent l’équilibre plus fragile que chez un jeune athlète affûté.
Voir la chute de Tyson comme un scénario, plutôt qu’un simple résultat physiologique, c’est méconnaître la réalité d’un corps qui a tout donné pendant trois décennies.
Mais surtout : truquer un combat, c’est se suicider professionnellement. Les commissions athlétiques ne pardonnent pas. Et l’histoire l’a prouvé.

Photo: Facebook – Panama Lewis
1983 : Luis Resto et Panama Lewis. Gants manipulés, bandages trempés dans du plâtre. Résultat : un boxeur brisé à vie. Lewis banni, Resto en prison. Une affaire si infâme qu’elle est devenue un cas d’école dans les formations des commissionnaires.
Années 1950–60 : Carbo et Palermo. La mafia contrôlait des champions, achetait des combats, tirait les ficelles de titres mondiaux. Ils ont fini en prison pour extorsion. Aujourd’hui, aucune commission ne laisserait passer le quart de ce qui se faisait alors.
Années 1990 : la tentative de manipulation autour de Seldon–Ferguson. Enquête du FBI, suspensions, carrières brisées. Même sans preuve de truquage total, les dommages ont été irréversibles.
Années 2000 : le promoteur Ilya Grad. Tentatives d’« acheter » des performances pour influencer les paris. Sanctions, interdictions, réputation anéantie.

Photo: Facebook – Ilya Grad
Tous ces scandales montrent une chose :
les magouilles finissent toujours par exploser, et elles détruisent tout sur leur passage.
Alors oui, le doute plane. Parce que la boxe excite l’imaginaire, parce qu’un influenceur qui met des boxeurs au tapis dérange, parce qu’on cherche des explications spectaculaires à des résultats qui nous surprennent.
Mais malgré les murmures, malgré les clips TikTok analysés à l’infini, je persiste :
je ne crois pas que les combats de Jake Paul soient truqués.
Et si c’était le cas, les signes, physiques, techniques, institutionnels, seraient déjà visibles.

Photo: CBC News – Jake Paul vs Julio Cesar Chavez Jr
Et qu’on l’aime ou non, il faut regarder la réalité en face : malgré tout ce que les gens diront, Jake Paul remplira encore un gigantesque amphithéâtre, sera télédiffusé dans des millions de foyers et offrira à une dizaine de boxeurs la chance d’évoluer sur la plus grande scène possible. Ce n’est pas de la lutte où tout est chorégraphié, où les scénarios se répètent et où les risques sont calculés. C’est de la boxe, un sport où chaque coup porte, où chaque erreur coûte, où chaque round laisse une trace sur le corps. On peut contester sa place, débattre de son influence, critiquer son personnage. Mais ce qui se passe dans le ring, sous les lumières et devant les caméras, ça demeure du vrai combat. Et ça, personne ne peut le truque