Photo : Vincent Ethier – Au cours d’une carrière bien remplie, sans avoir eu à remporter le titre mondial des poids lourds, Simon Kean aura marqué à jamais l’imaginaire québécois.
L’idée errait dans sa tête depuis déjà un bon moment, mais est devenue officielle au matin du 30 janvier : à 35 ans, le boxeur Simon Kean a livré son dernier combat.
Au travers des années, Punching Grace a diffusé la grande majorité d’entre eux, cela aurait été facile de vous offrir un résumé de ses plus grandes victoires et de ses plus percutants K.-O., mais avant les chiffres et les ceintures, la carrière du québécois fut avant marquée par des moments d’émotion et de fierté. Dans cette optique, cela aurait été injuste d’en parler sans céder la parole au « Grizzly » lui-même.
« Il y a deux choses qui comptent au moment d’accrocher les gants, c’est ta santé et ton argent, mais l’argent ne va pas sans l’autre. Alors moi, à 35 ans, je ne sentais plus que j’avais quelque chose à gagner en continuant de boxer, versus ce que j’avais à perdre », confie le Trifluvien, lucide et paisible, après une carrière de 25 combats, incluant 23 victoires, mais encore 22 K.-O.
Vainqueur à la vie
Dans la dernière décennie et plus encore, Simon Kean aura soulevé le peuple québécois du haut de ses 6’5’’. En 2012, il se fit connaître du grand public en participant aux Jeux olympiques de Londres dans lesquels il battra celui qui remporta le tournoi quatre ans plus tard, le français Tony Yoka. Mais ce n’était que le début, en s’associant avec Eye of the Tiger, son éternel promoteur, il effectua ses débuts pros’ en automne 2015, nous offrant ensuite de nombreux combats d’anthologie.
Parmi les premiers qui nous viennent en tête, il y a sa démolition d’Adam « The Boogeyman » Braidwood, dans un Centre Gervais-Auto de sa Mauricie natale plein à craquer, ou encore, son triomphe lors du combat revanche face à Dillon « Big Country » Carman. Aux yeux de Simon, toutefois, vaincre certains de ses plus féroces compétiteurs n’aura été qu’un bonus de ce que la boxe lui a réellement apporté.
« Écoute, j’ai commencé la boxe pour les mauvaises raisons. J’étais un bum qui voulait juste devenir encore plus bum, alors je m’étais rendu au gym pour apprendre à me battre. Finalement, ça m’a amené à vivre, à voyager dans le monde, à avoir une carrière et c’est sûrement ça qui m’a sortie du chemin où j’étais », raconte-t-il, reconnaissant, notamment envers ses entraîneurs ; de Jimmy Boisvert, Denis Hince, à Jessy Ross Thompson, son équipe, ses commanditaires de longue date… et ses supporters.
Une connexion sincère
Chez les professionnels, Simon Kean fut un habitué des grands soirs. Il mit les gants au Centre Bell et Centre Vidéotron à maintes reprises. Même dans la défaite, face à l’ex-champion poids lourd Joseph Parker, il termina sa carrière à Riyad, en Arabie Saoudite, théâtre de l’une des plus importantes cartes de boxe jamais présentée. Malgré tout, cela vous semblera cliché, mais il n’a jamais oublié d’où il venait.
« Quand je repense à mes premiers combats [amateurs], au Colisée Jean-Guy Talbot, tout le monde à mon école secondaire venait m’encourager, ça m’a valorisé et tout est parti de là. Après ça, quand je me suis battu aux Olympiques ou contre Braidwood, les gens ont continué de m’encourager et dans ma tête, c’était toujours ma même gang du secondaire qui venait me voir au Colisée », se rappelle avec nostalgie le produit de l’Académie les Estacades.
« Sans eux je n’aurais pas pu faire ça, comme je disais, c’est la foule qui m’a fait aimer la boxe, alors quand un fan m’accroche dans la rue, pas une groupie, un vrai fan, qui a regardé et qui me parle de mes combats, il a tout mon respect », témoigne le showman, toujours près des siens.
« Fort depuis 1989 »
Et c’est ainsi que, sobrement, l’aspirant mondial accroche ses gants, mais comme la vie continue, pour l’homme derrière, la retraite n’a pas encore sonné. On vous pose donc la question sans plus entendre… avez-vous besoin d’une nouvelle toiture?
C’est que le géant de Mauricie avait placé ses cartes. En persévérant, comme il l’a toujours fait sur le ring, il a obtenu sa licence d’entrepreneur de construction. Toitures Simon Kean a donc vu le jour, avec un toit et des anneaux olympiques comme logo, doublé du slogan : « Fort depuis 1989 ».
« La toiture, c’est un peu comme la boxe. Il n’y a pas de miracles, mais si tu as du caractère et que tu travailles fort, tu peux réussir », achève l’entrepreneur, troquant les gants pour un marteau, tout en conservant l’ambition et la volonté du « Grizzly ».