Photo: Jessy Ross Thompson – Homme orchestre, l’entraîneur est également devenu ambassadeur pour Rival Boxing chez nos voisins du sud.
Jessy Ross Thompson est un entraîneur réputé au Québec. Jusqu’à récemment, il avait son gymnase à Montréal, des dizaines de boxeurs, professionnels comme amateurs, et une belle maison en banlieue. Ça aurait été facile d’en rester là, dans cette zone de confort dont plusieurs rêvent. Mais son rêve à lui, c’était le rêve américain.
En mars dernier (À LIRE ICI), l’homme de coin laissait tout ça derrière lui pour repartir à neuf à St Petersburg, Floride, avec sa femme et leurs trois enfants. C’était un pari risqué. Difficile à prédire et plus difficile que prévu, mais neuf mois plus tard, le voilà qui prend vie.
«Je dirais que c’était une année d’introduction. À Montréal, j’avais ma réputation, les gens me connaissaient et savaient ce que je pouvais faire. Ici, c’était de me représenter à nouveau, montrer ce que je savais faire, créer des connexions avec les boxeurs, les gérants, et faire circuler mon nom», relate celui qui n’a pas chômé une seconde depuis son départ.
Chiffres à l’appui: en 2025, il a travaillé dans plus de 80 coins, aux 4 coins des États-Unis. C’est une année record, même pour un entraîneur ayant presque appris à marcher dans un ‘gym’ de boxe.
Contre ouragans et marées
Niveau boxe: il ne serait pas exagéré de parler d’un départ canon. C’est une chose de «repartir de rien» dans un domaine où on sait comment remonter. Ailleurs, ce ne fut toutefois pas de tout repos.
Pour du tourisme, c’est les oranges et la plage. Pour un déménagement, c’est l’inconnu.
La transition n’est pas simple, car même la mécanique du quotidien n’est pas la même. Comment enregistrer son véhicule, inscrire ses enfants à l’école, comprendre les impôts… et même la taxe son eau. D’autant plus que, pour assurer la transition, le père de famille a d’abord dû se prendre un emploi à mi-temps dans l’entretien de bâtiments.
Et puis, le déménagement s’est vécu vers une roulette qui, à l’image de la jeune famille qu’elle abritait, fut solidement mise à l’épreuve. Croyances libres: comme si Poséidon, ou bien Mère Nature, voulait tester les Thompson, deux ouragans ont frappé le ‘Sunshine State’ dès leur arrivée. Aux passages de Milton et Helene, par deux fois, l’increvable roulotte due être évacuée d’urgence.
«Si c’était à refaire, je ne sais pas si je le referais. En tout cas, je ne le recommanderais pas à beaucoup de gens. Et je dois donner tout le crédit à ma femme d’avoir rendu ça possible, parce que c’est elle qui gardait le fort en restant souvent seule la maison avec les enfants les soirs de galas où je travaillais.»
Ah, le rêve américain.
Terres en vues!
Ce rêve, ou cette terre promise, semble toutefois plus près que jamais.
Par la force des choses, en étant dans le coin de plus de 80 boxeurs, Jessy Ross Thompson s’est rapidement bâti une solide réputation aux États-Unis. Ses enfants sont bien inscrits à l’école, même que sa conjointe enseigne maintenant à la French American School of Tampa Bay. «Tout va dans la bonne direction, malgré les challenges», nous assure-t-il, soulignant qu’ils viennent même de s’acheter une propriété.
Au revoir la roulotte? Pas vraiment. Elle déménagera plutôt aux abords du gymnase, à deux pas de la plage, pour accueillir les boxeurs internationaux.
«On a un champion amateur de France qui est 4-0 chez les pros qui va venir trois semaines. Un autre d’Allemagne viendra ensuite. Ça commence à prendre forme», indique-t-il, invitant également les boxeurs du Québec à venir tenter une expérience différente.
‘Think big’
Car après avoir passé 2024 sur la route, souvent comme cutman ou assistant, Jessy Ross Thompson compte passer 2025 dans le gymnase, comme entraîneur, à bâtir son équipe.
«C’est dans ça que j’excelle et c’est pour ça que je suis venu», vient-il noter, en mettant la barre haute pour les années à venir.
«Le but ultime est d’avoir un gymnase qui compétitionne avec les Freddie Roach et Robert Garcia de ce monde. On a déjà les ressources, avec nos nutritionnistes, nos préparateurs physiques. Avec Coach Rick [Carorongan], on a du momentum en ce moment. D’avoir des boxeurs comme ‘Hot Rod’ [Kalajdzic], Cesar Tapia, Connor Coyle, ça nous donne aussi de bons arguments pour en motiver d’autres à venir s’entraîner ici.»
Car comme il le souligne, c’est un peu comme ça que tous les grands entraîneurs se sont fait un nom. Amener boxeur au sommet… ça en attire d’autres. On pense à Eddy Reynoso avec ‘Canelo’, Robert Garcia avec son frère Mikey, ou même Marc Ramsay avec Jean Pascal.
Ce qui vient ici aider la cause de ‘JRT’, c’est qu’au ‘USA’, les perles rares sont plus nombreuses.
«C’est la plus grande différence avec le Québec. Le niveau de boxe et de coaching n’est pas moins bon, il est excellent en fait. Mais le bassin de talent – et donc d’opportunité – est tellement plus grand ici… Ce n’est même pas comparable», pré-conclut l’entraîneur, en paix sa décision.
«Ce n’est pas pour tout le monde, mais moi, c’est ce que j’ai toujours voulu faire.»
Le rêve américain n’est pas sans obstacles, mais si on les surmonte, il est sans limites.
Ligne du temps
Ramirez vs. Ziyatdinov
25 janvier 2024 / Montréal: dans l’un de ses derniers coins avant son départ, il mène Artur Ziyatdinov vers un combat bien plus compétitif que prévu face à Albert Ramirez. «Je suis resté en contact avec Artur, et c’est un des gars qui voudrait venir s’entraîner ici. C’est juste un peu plus compliqué pour lui avec les visas.»
Poulin vs. Bouchard
23 mars 2024 / Drummondville: Jan Michael Poulin devient le premier québécois à suivre son entraîneur en Floride. Revenant visiblement en pleine forme au Québec, il met la main sur son 2e championnat canadien face à Sébastien Bouchard. «Je sais aussi que Simon Kean viendra si un combat contre Makhmudov venait à se matérialiser…»
Morrell Jr vs. Kalajdzic
3 août 2024 / Los Angeles: accompagné de l’entraîneur Rick Carorangan, il est dans le coin de Radivoje ‘Hot Rot’ Kalajdzic pour son combat de championnat mondial WBA face à David Morrell Fils. Ce soir-là, pour les débuts américains de Riyadh Season, ‘Hot Rod’ en surprend plusieurs en offrant au Cubain son meilleur test en carrière.
Plant vs. Mccumby
14 septembre 2024 / Las Vegas : le nom et la réputation de Jessy Ross Thompson commencent à circuler aux États-Unis. L’équipe de Trevor Mccumby décide de faire appel à lui comme cutman pour son combat de championnat mondial intérimaire face à Caleb Plant. En sous-carte de ‘Canelo’, Mccumby subira une coupure au 5e round, mais ne sera jamais trop inquiété par cette dernière. Il offrira un combat de feu à ‘Sweet Hands’ Plant qui visitera même le tapis « Mccumby est justement censé venir faire un camp avec nous cet hiver.»
Torrez Jr vs. Gutierrez
7 décembre 2024 / Phoenix : samedi matin (heure de l’Est), j’appelle Jessy Ross Thompson pour l’entrevue. On discute un peu des combats des combats du gala Navarrete-Valdez, puisqu’il est dans le coin de deux boxeurs de la sous-carte. L’un de ceux-ci est Issac Gutierrez qui affronte le super-prospect Richard ‘Kiki’ Torrez Jr. Quelques heures plus tard, mon ami Laurent Poulin de Boxingtown Québec m’appelle. Il me dit: «je viens de voir le poids lourd avec le meilleur menton que j’ai vu de ma vie sur un show de Top Rank! Tu ne devineras jamais qui était dans son coin…».